Julos Beaucarne, Vous ne m'écrivez plus de lettres d'amour tendre
Vous ne m’écrivez plus de lettres
D’amour tendre ;
De vous je ne sais plus qu’un regard,
Qu’une nuit ;
Vous n’essayez plus, je crois,
De me comprendre ;
La nuit porte-douceur me parle,
Je suis nu.
Je n’ai de vos nouvelles
Que par des prospectus,
Qu’un facteur ivre apporte
Aux heures du matin ;
Dans les r’vues de ciné,
La photo vous va bien,
Votre œil regarde ailleurs,
Mon règne est à sa fin.
Sur des lieux de tournage
Vous tournez d’autres films,
Le nôtre, à ce que je vois,
Ne passe plus en salle ;
En province parfois,
Quelque cinéphile
Le projette, discret,
Dans un ciné-forum.
Hollywood est bien loin
Dans mes pensées sauvages,
Et la Goldwyn Meyer
A quitté mon village,
Dans le rétroviseur
Des plus beaux souvenirs,
Vos cheveux blonds s’envolent
A n’en plus, à n’en plus finir.
Mettre une croix sur tout,
Partir c’est donc mourir
Un peu à ce qu’on dit,
Il me semble impossible
De tuer mes souvenirs,
Et quoi que l’on en dise,
Ils me bercent parfois,
A défaut d’avenir.
Taxé de passéisme
Dans les journaux du soir,
J’apporte un correctif,
Et mon droit de réponse
M’autorise à vous dire
Que si je broie du noir,
C’est pour mieux apprécier
La lumière derrière l’ombre.